Paris Secteur Seine Sud-Est
Secteur Seine Sud Est - Perspectives de l'avenir © Apur
Le schéma de secteur Seine Sud-Est, publié dans la revue Paris Projet dès 1974, est représentatif de la profonde transformation qui s’opère…
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à cette époque, au sein des services de la Ville de Paris, au sujet des
approches des questions urbaines et dont l’Apur est le principal moteur. Il
témoigne de l’acuité des visions alors développées.
Le
schéma de secteur Seine Sud-Est, dont la coordination des opérations
d’aménagement est confiée à Pierre-Yves Ligen en avril 1974, s’inscrit dans le
Schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme (SDAU) de Paris dont il est un
approfondissement programmatique et organisationnel local. Il fait la synthèse
entre celui-ci, qui voit en ces lieux les « zones majeures d’intervention
sur lesquelles seront concentrées les grands pôles d’emplois tertiaires et les
puissants aménagements qui doivent les accompagner » et le SDAU de la
région parisienne de 1965, qui préconise en cette « grande et multiple
croisée de moyens de transport », « un centre recentré d’accès
commode », tout en proposant de préserver les 900 arbres (sic) des
entrepôts à vin de Bercy délocalisés et d’y créer un parc de 8 à 10 hectares.
En
ce sens, il reflète les paradoxes de cette époque de transition, pendant
laquelle les projets radicaux des secteurs de rénovation sont progressivement révisés
avec une attention plus sensible aux lieux, alors que les grands schémas de
planification et d’aménagement hérités de la décennie précédente s’appliquent
toujours. Cette tension est perceptible dans les orientations du schéma, qui
prennent explicitement le contre-pied du « coup parti » de l’opération
Rapée : rupture d’échelle, concentration des bureaux, « impossibilité
de toute ouverture vers la Seine »… Elle est visible jusque dans le
graphisme des documents : d’un côté les études de l’Apur évoquent une
approche organique des systèmes urbains et, de l’autre, les schémas de
présentation à l’attention du public poursuivent la veine mécanique et géométrique
moderniste.
Cette dichotomie est encore lisible aujourd’hui dans le rapport
qu’entretiennent formes urbaines et infrastructures : tandis que Bercy, Chalon,
Corbineau-Lachambaudie ou, dans une certaine mesure, Paris-Rive gauche sont, à
leur manière, attentifs à l’héritage morphologique parisien, le secteur est
traversé de grandes infrastructures routières, sur les berges (2x3 voies en
rive droite) ou sous la gare de Lyon, le pont Charles-de-Gaulle témoignant du
tardif abandon de cette logique puisque la voie qui l’emprunte bute sur le
domaine de la gare d’Austerlitz dont elle devait traverser la nef… Seine
sud-est concerne aussi des emprises éloignées du fleuve, comme la gare
marchandises Reuilly, pour laquelle un schéma organique des principes
d’aménagement est déterminé dès 1977. Avec autant de mètres carrés de logement
que de bureau, ainsi que de l’activité et du commerce, la ZAC Reuilly est
représentative du rééquilibrage vers l’Est promis par le schéma de secteur.
C’est l’une des qualités de ce schéma, que d’avoir été ambitieux quant
aux principes et relativement souple en ce qui concerne leur mise en œuvre. Il
a pu accueillir le ministère des Finances, le Palais omnisport de Paris-Bercy, ou
la bibliothèque François-Mitterrand, tout en maintenant des entités morphologiques
cohérentes. De là découle l’expression contrastée des programmes qui, à Bercy
et à Seine-Rive gauche, concourent aux mêmes objectifs. Dans le premier, le
lieu métropolitain de référence est d’usage domestique. Il s’agit d’un parc (concours
européen de 1987) sur lequel donnent des logements et une salle omnisport, les
activités tertiaires et commerciales étant reléguées dans le bien nommé
« fond de Bercy ». Dans le
second, le lieu qui assume cette dimension métropolitaine est l’avenue de
France, nouvelle vitrine tertiaire de la capitale. A chaque époque correspond une
mise en espace spécifique des mêmes objectifs programmatiques.
Pour autant, c’est bien
la stratégie de rééquilibrage de Paris vers l’Est promue par ce document qui se
poursuit encore aujourd’hui et qui s’est enrichie d’une volonté d’associer plus
finement les deux rives de la Seine. Les études menées par les équipes pilotées
par Richard Rogers à Bercy-Charenton, ou par Yves Lyon à la porte de la Gare,
qui ouvrent une brèche dans la frontière parisienne, en sont le prolongement
annoncé dès 1974.
A.L.