Evolution tendancielle du nombre de logements et du nombre de ménages jusqu'en 1996
Vue sur un chantier de construction dans le 15e arrondissement © Mairie de Paris - DU - MCC
Cette petite note de décembre 1985 se situe entre les recensements de 1982 et de 1990. A cette époque les recensements ne sont pas annuels et les estimations...
... localisées de population sont comme ces
chemins des faubourgs qui la nuit ne sont éclairés que de loin en loin. C’est à juste titre que les démographes
prennent d’infinies précautions quand ils se risquent à prolonger sur l’avenir
les enseignements qu’ils tirent du passé. La terminologie en témoigne
« évolution tendancielle », « perspectives »,
« projections » et moins souvent « prévisions ». Pourtant
leurs travaux sont indispensables pour éclairer la politique d’urbanisme à
mener.
La question est
grave : Paris vient de perdre entre 1962 et 1982, environ 600 000
habitants, passant de près de 2 800 000 à moins de
2 200 000. Cette période a pourtant été marquée par une construction
de logements neufs record, dépassant parfois les 15 000 par an. Or,
justement, le rythme de construction annuel peine à atteindre désormais les
5 000 logements. Combien de logements faudrait-il construire chaque année pour
enrayer l’hémorragie que l’on craint ? Tel est le contexte. La note répond
qu’il faudrait construire 5 500 à 10 000 résidences principales pour
que le nombre de ménages se stabilise. L’espoir d’une baisse raisonnable reste
ouvert.
En fait, mais personne
ne le sait, les choses sont en train de changer beaucoup plus profondément :
les « tendances » à la baisse drastique de la population parisienne
observées depuis les recensements de 1954 et de 1962 se modifient radicalement.
Les transformations de logements en bureaux et autres locaux d’activité,
désormais encadrées, deviennent marginales. Le nombre de logements vacants, nul
dans les années 1950 a atteint en 1982 un étiage de 125 000. La baisse de
la taille des ménages, responsable de plus de la moitié de la baisse observée
de la population, se ralentit considérablement.
Et en effet, le
recensement de 1990 va apporter un immense soulagement : la population n’a
baissé, en 8 ans, que de 1% environ -24 000 personnes. C’est inespéré.
Certes ce recensement-là a été réalisé avec un soin tout particulier. La Mairie
de Paris a demandé l’assistance opérationnelle des équipes de l’Apur et a mis à
profit les connaissances du parc immobilier de la Banque de données urbaines, afin
d’éviter à tout prix toute négligence dans le repérage des immeubles à recenser
ou dans la qualification de vacant donnée aux logements dont les agents
recenseurs ne parviennent pas à joindre les occupants. Les relances sont
systématiques et les contrôles ont lieu en Mairie tous les jours pendant toute
la durée de la collecte. L’Insee s’inspirera par la suite de l’expérience
parisienne menée avec l’Apur pour améliorer ses méthodes de recensement, en
utilisant notamment, pour les repérages préalables, le fichier de la propriété
bâtie, de la taxe d’habitation et des permis de construire. Le recensement de
1999, lui aussi « amélioré », viendra confirmer les nouvelles
tendances : Paris ne perd, en 9 ans, que 27 000 habitants, exactement
au même rythme qu’entre 1982 et 1990. Mais pourquoi un tel retournement de
tendance ? Que s’est-il passé ? La réponse sera bientôt apportée de
façon très complète.
En effet entre
2000 et 2002, dans le cadre de la révision du plan local d’urbanisme (PLU) l’Apur
se voit confier l’élaboration de perspectives démographiques jusqu’en 2020. Une
étude exhaustive est lancée pour comprendre ce qui s’est passé de 1954 à 1999 et
pour tracer des perspectives aussi réalistes que possible pour 2020. Elle est confiée
au professeur Alfred Dittgen. Elle est passionnante par la profondeur et la
virtuosité de l’analyse. Un résumé en est publié en décembre
2002 : « Perspective 2020 :
Paris restera au-dessus de 2 millions d’habitants ». Ce
travail remarquable est-il confirmé par les recensements plus récents ? Il
est trop tôt pour en juger à l’horizon 2020. Toutefois les étapes
intermédiaires 2010 et 2015 indiquent que la réalité ne s’est pas tout à fait
conformée aux perspectives tracées en 2002 : non seulement Paris reste au
dessus des 2 millions d’habitants, mais au 1er janvier 2014 l’Insee
estime la population parisienne à 2 220 000 habitants soit bien au
dessus des 2 100 000 de l’hypothèse centrale de la projection pour le
1er janvier 2015, et au dessus également des 2 162 000 de son
hypothèse haute. A suivre donc pour savoir pourquoi à travers de prochaines
études.
P.R.
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