Espaces publics - Paris Projet n° 30-31
Point de vue sur les Champs-Elysées en 1999 avant la réhabilitation © Marc Verhille - Mairie de Paris
En juin 1993, l’Apur publie le n° 30-31 de Paris Projet intitulé « Espaces publics », sujet central pour l’Atelier, l’aménagement des espaces publics...
... étant une composante-clé des transformations de la ville.
Ce numéro de la revue fait le point sur de nombreux projets de
réhabilitation ou d’aménagement réalisés ou lancés depuis les années 1985,
auxquels sont ajoutés les futurs parcs de Bercy et Citroën, issus de concours
internationaux. Si les échelles, les contextes et les objectifs de ces projets peuvent
être différents, tous associent, à des degrés divers, respect de l’héritage et
esprit d’innovation.
La « doctrine » proposée par l’Apur, déjà exprimée dans le
SDAU et le POS de 1977, conteste la pertinence des fondamentaux de l’urbanisme
moderne. Elle dénonce le plan libre et entend réhabiliter la rue en tant
qu’armature essentielle de la ville et en tant qu’espace public. Ainsi, les
opérations d’aménagement révisées ou conçues par l’Atelier depuis la fin des
années 1970 s’appuient sur un maillage de rues enrichi et actent la fin d’un
urbanisme de dalle qui vise la séparation des piétons et des voitures. Les projets
de requalification des grandes promenades des berges des canaux et de la Seine,
comme des bois de Boulogne et de Vincennes, proposent de supprimer une bonne part
des tracés routiers qui les parcourent. Et différents projets portant sur des
espaces de voirie (abords des gares, place de l’Opéra, restructuration du
réseau des bus,..) cherchent à créer des espaces réservés aux piétons et aux
transports publics.
Au début des années 1990, les objectifs de fluidité
de la circulation et de création de parkings souterrains demeurent, mais la
priorité donnée à la voiture jusqu’au début des années 1970 a nettement reculé.
Dans un contexte très dynamique pour l’aménagement, plane un air de renouveau
en faveur d’une approche de l’espace public plus apaisée, plus soucieuse de
l’héritage et plus respectueuse de tous les usagers. Paysage, rôle de la
nature, diversité des usages sont de mieux en mieux pris en compte.
Paris Projet
30-31 illustre ces thèmes. L’espace public, élément majeur pour la mutation des
quartiers, est désormais abordé comme un espace de projet à part entière. Autre
donnée nouvelle : les projets de certains lieux majeurs de la capitale sont
attribués à des équipes de renom, de gré à gré ou au terme de consultations
d‘architectes et de paysagistes. Les reconquêtes des Champs-Elysées (Bernard
Huet architecte), du boulevard Richard-Lenoir (consultation : David.
Mangin et Jacqueline Osty lauréats), de la place de la Bataille-de-Stalingrad
(Bernard Huet architecte) réduisent ainsi nettement la place de la voiture et
la place du stationnement de surface au profit des piétons.
Les transformations concernent aussi d’ex-voies
rapides, les radiales dont les projets abandonnés au milieu des années 1970 ont
laissé des espaces béants dans la ville. La consultation pour l’aménagement de la
rue de Flandre (ex-axe Nord-Sud) préparée par l’Apur pour la direction de la
Voirie (Marc Béri lauréat,) en témoigne. Un paysage global et linéaire est mis
en place par la création d’un terre-plein central planté de longs alignements
d’arbres qui structure la voie et par un travail soigné des trottoirs, des traversées
piétonnes, des sols et de l’éclairage.
Les deux consultations pour les nouveaux grands
parcs de Paris – Citroën et Bercy – dont les cahiers des charges ont été conçus
par l’Apur (tous les projets candidats sont publiés dans ce Paris Projet), soulignent
les tendances au respect de l’héritage (Bercy) et à l’innovation, avec l’entrée
d’une nature sauvage dans la ville (Citroën).
Le réaménagement du boulevard Richard-Lenoir, quant
à lui, combine mise en valeur d’un tracé historique et création de jardins au centre
du terre-plein, permettant une multiplicité d’usages.
Des projets plus locaux, comme ceux de la Buttes aux
Cailles ou de la rue Montorgueil par exemple, illustrent l’extension à de
nombreux quartiers de cette action de reconquête des espaces publics. A la fin
des années 1990, la « politique des quartiers tranquilles » vise à
ralentir et modérer le trafic dans une série de quartiers d’habitation grâce à
des aménagements de la voirie.
Avec les années 2000, le paradigme change avec la priorité donnée aux
questions de santé, d’environnement et de partage de l’espace public. La
réduction volontaire de la présence de la voiture et la création de nouveaux
services pour promouvoir la mobilité douce et donner une place au piéton deviennent
les objectifs premiers. La fluidité de la circulation et l’offre de
stationnement ne sont plus des critères. L’Apur prend part au développement de
cette politique par de nombreux travaux sur les espaces civilisés, le schéma
directeur des espaces cyclables, les études préparatoires à l’arrivée de
Vélib’et d’Autolib’…
N.S. / C.B.